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Réserve Citoyenne du Gouverneur militaire de Paris

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Bernard Labauge : itinéraire d’un appelé pendant la guerre d’Algérie – 1/3.

Publié par Réserve Citoyenne Armée de Terre IDF sur 18 Janvier 2022, 21:41pm

Catégories : #Mémoire

Bernard Labauge fait ses classes au CIDB de Trèves (RFA), avec la spécialisation de pilote EBR.

Bernard Labauge fait ses classes au CIDB de Trèves (RFA), avec la spécialisation de pilote EBR.

 

Bernard Labauge est membre de la Réserve Citoyenne Terre – Ile-de-France (lieutenant-colonel ad honores). Il œuvre au sein du groupe des Réservistes Locaux à la Jeunesse et à la Citoyenneté, dans le département de l’Essonne.

 

Son portrait est à retrouver ici : http://www.reserve-citoyenne-paris.org/2015/03/bernard-labauge.html

 

Il y a quelques années de cela, Bernard s’est confié à la Fondation pour la Mémoire de la Guerre d’Algérie, des Combats du Maroc et de Tunisie. Créée en 2005, celle-ci a pour mission d’expliquer les événements et d’en transmettre la mémoire (site : https://www.fm-gacmt.org/) .

 

 

1 – L'Allemagne.

Bernard Labauge : « J'ai été incorporé le 5 juillet 1959 à la caserne Charras à Courbevoie après avoir subi les épreuves de la journée de présélection à Vincennes, le 4 juin 1959.

Nous partons en camion pour la gare de l'Est. Étonné de constater que le convoi était encadré par des motards de la police, pas avares de coups de sifflet. J'ai compris, beaucoup plus tard, qu'il s'agissait de prévenir d'éventuelles manifestations d'opposants au départ des appelés en Algérie.

Affecté au Centre d’instruction des divisions blindées (CIDB) à Trèves en République Fédérale d’Allemagne, je suis arrivé le 6 juillet pour faire mes classes, en tant que pilote d’automitrailleuse EBR Panhard, malgré ma taille (1,71 m), un peu grande pour pouvoir me glisser aisément dans le poste de pilotage.

Le CIDB était une spectaculaire "usine" à former des soldats pour assurer le "maintien de l'ordre" en Algérie : combat à pied et spécialités de pilote et tireur sur les blindés en service dans l'armée française de l'époque : EBR Panhard, AMX 13, Patton M 47. Avantage de cette affectation dans l’arme blindée et cavalerie (ABC) : transformation dans le civil du permis militaire de conduire les motocyclettes, les véhicules légers, les poids lourds et autres engins spéciaux.

Après ces quatre mois d’instruction dans l’Armée Blindée et Cavalerie (ABC), j’ai été affecté, le 30 octobre 1959, au 24° Régiment de Spahis situé à Neustadt Weinstrasse, (Rhénanie-Palatinat). En Allemagne, j’ai franchi les grades de brigadier (caporal dans l’infanterie), de brigadier-chef, puis j’ai obtenu le grade de maréchal-des-logis (sergent dans l’infanterie), après avoir passé avec succès les épreuves du certificat interarmes (CIA) dans un camp militaire franco-allemand situé à Stetten Am Kaltenmarkt, à quelques kilomètres des bords du lac de Constance.

Cette première année de service s'est déroulée à Neustadt-Weinstrasse puis à Pforzheim (Bade-Wurtemberg), où le régiment avait déménagé. Nous faisions de l'instruction de jeunes recrues, pilotage, exercices de tir (réel ou avec le simulateur de tir « De Galbert ») et des manœuvres dans le cadre de la protection de l'Europe occidentale, vis à vis d'une menace venant de l'Est, soit sur des terrains proches des casernes, soit au camp de Baumholder, (Palatinat), soit au camp de Mailly, en France. Nous devions assurer aussi des servitudes, comme la gestion administrative du parc de véhicules, EBR, halftracks, jeeps, des patrouilles en ville, pour surveiller la tenue des permissionnaires et des gardes, dont une mission, pas très agréable, à la prison militaire de Landau…

En novembre 1960, j’ai été désigné pour effectuer la seconde partie de mon service militaire en Algérie, affecté, en tant que sous-officier, chef de voiture sur EBR Panhard, au 1er Régiment de Spahis Algériens.

 

2 – L'Algérie.

Je suis arrivé en Algérie le 15 novembre à Bône (Annaba), venant de Marseille (Camp de Sainte-Marthe), après m’être embarqué sur le « Ville d’Alger », la veille, le 14 novembre 1960. J’ai été affecté en Algérie au 4e escadron du 1er Régiment de Spahis Algériens. Cet escadron était en cours de formation. Il venait de s’installer au lieu-dit de Munier (Ain Kerma), sur une sorte de promontoire, une terrasse à mi-pente d’une colline couronnée par une forêt de chêne-liège.

Elle dominait une vallée dans le fond de laquelle serpentait le barrage électrifié, appelé la ligne Morice. La colline en face, un terrain broussailleux et boisé, remontait jusqu’à la frontière avec la Tunisie, située sur la crête. Cet emplacement se situait à une centaine de kilomètres au sud de Bône sur le flanc nord du "bec de canard", en face de la ville tunisienne de Ghardimaou. À la pointe de ce redan de la frontière on trouve, dans la vallée, la bourgade de Lamy (Bou Hadjar), où était situé le PC du régiment.

 

3 – La mission du 4e escadron : la herse.

Les automitrailleuses du 1er Régiment de Spahis faisaient parties d’un dispositif très sophistiqué pour maintenir l’étanchéité de la ligne Morice.

Le long de la frontière tunisienne, elle consistait à interdire le passage des hommes, le ravitaillement en armes, munitions et vivres des combattants algériens de l’intérieur, par l’état-major algérien de l’ALN situé à Ghardimaou (Tunisie). Entre la frontière réelle et la ligne Morice, courait à même le sol, un fil électrique dit « boucle piège ».

À partir du barrage électrifié et sur une profondeur de la dizaine de kilomètres, s’étageaient des séries de défenses. D’abord, au plus près, sur quelques centaines de mètres de profondeur, des blockhaus constitués de grosses pierres entassées les unes sur les autres et de rondins ou s’installaient les fantassins, puis des points d’observation avec des vues aussi lointaines que possible où les automitrailleuses venaient se mettre en place, le tout relié par des chemins de terre tracés à coup de bulldozers.

Puis, plus en arrière, d’autres blockhaus et des nids de barbelés pour freiner l’avance des assaillants en cas d’attaque massive. Tout le secteur était balayé par une surveillance radar, couplée à des canons de 105 et de 155 mm. Tous ces éléments étaient en relation radio permanente et en particulier avec les tours des électriciens du génie. Il y avait une tour tous les 5 ou 10 kilomètres environ pour surveiller le courant électrique de la boucle piège et du barrage principal.

Ainsi, tous les incidents qui pouvaient survenir, notamment les coupures de courant étaient signalées avec une précision de l’ordre de la centaine de mètres. Souvent, c’étaient des sangliers qui créaient l’incident et il ne se passait rien : c’était une fausse alerte.

Cependant, toutes les deux ou trois semaines environ, il y avait une attaque véritable, un harcèlement plutôt qu’une véritable tentative de franchissement en profondeur. Elle était destinée à détruire une partie du barrage électrifié et à infliger des pertes en hommes, en véhicules et en engins blindés aux unités en place et pour récupérer éventuellement des armes.

Bien qu’ayant entendu les balles siffler au-dessus de moi, je me souviens que, avec un rapport de forces aussi disproportionné, j’éprouvais un total sentiment d’invulnérabilité. Nous avions la maitrise de la situation. Les radars détectaient la colonne d’assaillants (une douzaine de soldats environ) descendant de la crête frontière. L’alerte était donnée. Nous faisions semblant de ne nous être aperçu de rien. La tour des électriciens nous indiquait le point kilométrique de la coupure des barbelés électrifiés, soit par pinces coupantes isolées, soit par explosif (torpilles Bangalore).

Nous prenions soin de ne pas nous ruer sur la coupure, car le but des assaillants était de se placer en embuscade de part et d’autre de la route parallèle au réseau, afin de bazooker les véhicules d’intervention, jeeps ou blindés. Au moment de leur repli, les radars dirigeaient le tir de l’artillerie et nous, à la lumière des projecteurs, nous utilisions les armes de nos blindés.

Le lendemain, la mission consistait à passer de l’autre côté de la ligne Morice, pour « aller aux résultats », voir s’il y avait des cadavres de l’ALN à relever ou des matériels abandonnés à récupérer. Le courant électrique était en principe coupé sur le réseau pendant la journée.

Cela ne concernait pas l’équipage de mon engin blindé, puisqu’il avait passé une nuit blanche. Il fallait alors récupérer du temps de sommeil, puis assurer l’entretien de l’automitrailleuse, nettoyer les armes, refaire le plein de munitions, les pleins d’essence, vérifier les niveaux d’huile, laver le véhicule, entreprendre les réparations éventuelles, faire des compte-rendu.

Les résultats étaient modestes. C’est qu’à l’époque, sans vision de nuit, sans engins à guidage laser, force était de constater le nombre ahurissant de projectiles qu’il fallait tirer, gaspiller, avant de toucher une cible.

Cependant l’essentiel n’était-il pas d’interdire la circulation des hommes, des documents, vivres, armes, munitions, etc. ?

Si les travaux sur le réseau duraient plusieurs jours, nous pouvions être désignés pour aller sur place, afin de protéger les soldats du génie, qui réparaient le réseau de barbelés, le câblage électrique et remettre en place les mines, etc.

Les apprentis pilotes, s’entraînent sur différents parcours en tout terrain avec des EBR Modèle 54, canon de 75 mm SA 49, tourelle FL 11.

Les apprentis pilotes, s’entraînent sur différents parcours en tout terrain avec des EBR Modèle 54, canon de 75 mm SA 49, tourelle FL 11.

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